En questionnant les frontières entre la recherche scientifique et l’imaginaire, la ‘Pataphysique semble être une science plutôt farfelue mais révélatrice de ce que l’artiste (comme le scientifique) définit comme création. Alfred Jarry, fou ou génie, reste une figure étrange et mystérieuse qui a laissé de nombreux secrets derrière lui. Son écriture va au-delà des mots, créant des personnages et des analogies (parfois incohérentes à première vue) et laissant libre cours à son imagination.






Jarry était également graveur et dessinateur. Ses illustrations accompagnaient régulièrement ses écrits, et apparaissaient dans différentes revues littéraires illustrées comme L’Ymagier dont il fut le fondateur avec Remy de Gourmont.

ENTR’ACTE
Les étoiles tombent du ciel

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Son inventivité perturbe, fascine, laisse perplexe, ou même incompris. Pourtant ses personnages et sa ‘pataphysique ont traversés le temps et l’espace et aujourd’hui encore est synonyme de créativité ingénue. Les mots se (ré)inventent, les subtilités du langage sont des terrains à (de nouveau) explorer et à redécouvrir. Car si le sens n’est pas toujours des plus claires, on ressent une profonde passion pour les langues qui fourchent et les mots qui se mêlent. Une différente logique prend place et déforme nos relations à la réalité et au reflet de celle-ci. Jarry a inspiré de nombreux artistes après lui, comme par exemple les surréalistes ou les dadaistes, se reconnaissant dans cette urgence de rapport non-rationnelle à leur existence.

Sa création débordante a poussé d’autres à s’approprier ses personnages et à les interpréter à leur propre sauce. Le personnage du père Ubu est à la fois satirique, pathétique et attachant. Il est devenu un antonomase par l’adjectif ubuesque signifiant grotesque, et reflétant les délires de l’homme par rapport au pouvoir. Ce personnage est aujourd’hui le plus reconnu de ses écrits, et leur relation est énigmatique. Alfred Jarry n’a vécu que jusqu’à l’âge de 34 ans et l’a invoqué dans ses écrits pendant 10 ans. On peut se demander si son anti-héros était une obsession, ou même une sorte d’alter-ego, lorsque à la fin de sa vie il finit par répondre au nom du Père Ubu.1


1 Gosztola, Matthieu, Jarry et les revues






Ce qui m’intéresse particulièrement avec Alfred Jarry plus loin que le personnage, ce sont les traces mouvantes qu’il a laissé et qui a inspiré d’autres à rendre hommage à sa créativité en exerçant la leur. La ‘Pataphysique, et les pataphysiciens qui la pratiquent, prône avant tout une curiosité inépuisable et ludique pour le monde sous tous ses angles.

J’ai fait la connaissance de la ‘Pataphysique un peu par hasard, puis deux livres dans une bibliothèque, dont les couvertures m’ont fascinées. Ceci étaient « Les Minutes de Sable Mémorial » et le deuxième « Choix de textes par Alfred Jarry ».




Sa mémoire est entre autres encore vivante grâce à l’existence du Collège de la ‘Pataphysique , et des pataphysiciens qui exercent encore aujourd’hui. La vidéo qui m’a interpellé sur les archives audiovisuelles SONUMA présente un ‘docu-fiction’ de la RTBF de 1976 dans laquelle on suit un détective suite à la disparition d’une certaine Mélanie Plumet.



Le jeu est le maître mot de ces images non-authentiques entre réel et irréel, image et langage, croyance et légende. Café viennois, cafés liégeois ou café renois? Ou encore café glacé? Les archives audiovisuelles de la ‘Pataphysique c’est du grand n’importe quoi mélangé avec une louche de mystique et non sans humour. Qu’est-ce que la ‘Pataphysique? La ‘Pataphysique est à la métaphysique ce que la métaphysique est à la physique.

Une science sans valeurs ni théories, une science du doute et du subtil, une mathématique de la subjectivité, et une bonne dose de second (même troisième et quatrième) degré. Le langage semble être un substance complexe et jubilatoire pour les pataphysiciens (Tout le monde est pataphysiciens mais seulement certains le savent - théorie classique répeté dans par example dans le catalogue raisonné de l'artiste Pierre Bismuth “Everybody is an Artist, but only the Artist knows it”, 1992, black marker on paper).

Le savoir qui s’imagine et s’invente, qui laisse un avant-gout de surréalisme et qui est gourmand de nouvelles histoires. A laisser moisir ou à dévorer tout cru?




Formulations érudites du non-sens, théorie du vide, infini de la troisième dimension :



SEUL LA PATAPHYSIQUE PEUT TOUT,
MÊME CE QU’ELLE NE PEUT PAS






Bye Bye Belgium, avec comme nom code Tout ca (ne nous rendra pas la Belgique) est un docu-fiction exceptionnel dans lequel est mise-en-scène la fin de Belgique.

Sur un air de Magritte, la RTBF annonce une nouvelle qui choque, la séparation de la Flandre et la Wallonie, et donc la fin définitive et brutale de la Belgique unie.

La crise identitaire que traverse la Belgique amène alors à interroger ce qui unit les différentes parties du pays, dont la langue complique souvent les communications. Le alors encore jeune François de Brigode et d’autres journalistes complices jouent une grande comédie d’un journal télévisé exclusif. Plus profond qu’un commentaire de la situation de crise (on est en 2006, cela remonte déjà un peu) ou un simple pastiche d’émission, la construction de cette édition très speciale interpelle tout d’abord sur comment les ‘nouvelles du jour’ sont transmises et sélectionnées. Explorant les possibilités du réel, ‘Bye Bye Belgium’ surprend une réaction forte du spectateur pour le faire réagir. Tous les différents acteurs, comme les différentes situations rendent floue cette fameuse frontière entre la Flandre et la Wallonie. Ceci sans parler de la situation encore plus complexe qui est celle de Bruxelles dans ce petit pays, ‘capitale de l’Europe’ - rien que ca.

La nouvelle est présentée sous la nouvelle inattendue que la communauté Flamande a décidée de prendre son indépendance. Le public de la RTBF qui est principalement wallon ou bruxellois se retrouve alors face à l’acte commis. Les dindons de la farce ont pour un grand nombre, foncés tout droit dans le panneau, certains ne se disant presque pas étonnés d'une décision pareille. Le réalisme du cadre de l'information (plateau-télé officiel du JT quotidien) et le sérieux des intervenants dévoilent au fur et à mesure de l'émission différents signaux indiquant aux plus attentifs qu'ils ont affaire à l’entourloupe.

« J’estime que, pour les études de nu moderne il ne faut pas faire le nu classique, mais bien le nu d’aujourd’hui qui a son caractère particulier et sa forme à lui qui ne ressemble à nulle autre. Il ne faut pas faire le sein de la Vénus de Milo mais le sein de Tata, qui est moins beau mais qui est le sein du jour. »

Lettre de Félicien Rops à Jules Noilly. Anseremme, Au Repos des Artistes, 14/08/1878.

Cela me rappelle le lieu même à Bruxelles où se situe la tour de télécommunication, partagée par les bureaux de la RTBF et la VRT. Les changements de noms des deux chaines nationales, RTB (Radio Téléphonie Belge) à RTBF (Radio Téléphonie Belge de la communauté française)en décembre 1977 et plus tardivement, en 1998 de la BRT (Belgische Radio en Televisie) en VRT (Vlaams Radio en Televisie) (en passant pendant un moment par BRTNederlands) sont les signes d’un questionnement identitaire de plus en plus important, qui va plus loin qu’une simple question de langues.

Panneau près de la tour Reyers, à Schaerbeek, qui fait 89 mètres de haut.

L’émission passe en revue les raisons de cette séparation mais également le chaos à venir. Entre les différentes sociétés de transports publics, les différents parlements, le problème est que malgré tout il y a énormément d’échanges entre les différentes régions. Cette problématique (qui au final n’en est pas une) relève de l’importance d’une union belge malgré les difficultés à surmonter qui sont des conséquences historiques, politiques, culturelles, et économiques. La Belgique n’est pas un pays simple point de vue logistique, nous aurions beaucoup à apprendre de nos voisins hollandais, mais ce mish-mash fait partie de l’identité Belge, et comme cette émission culte le confirme, son humour également. J’ai du mal à imaginer un second degré pareille dans un de nos pays voisins, et cerise sur le gateau sur une chaîne publique en plus!

Les ministres se réunissent alors dans un lieu secret qui se révèle être la dixième boule de l’Atomium, situé sous terre. Ce monument à caractère déjà futuriste devient alors une figure d’utopie. Si les informations du journal télévisé sont fausses, comment suivre les vraies actualités? La blague va plus loin qu’une simple farce, et questionne plus largement comment la transmission d’information a lieu, comment le transmetteur de l'information prend presque obligoirement position et transmets celle-ci. Chacun digère les informations comme il l’entend, mais les informations qui choquent, qui blessent, qui impressionnent sont celles dont on se souvient le plus. L’extraordinaire passe alors au-dessus de l’ordinaire. (?) L’Association d’images d’archives avec la voix très sérieuse de Francois Brigode joue sinueusement avec la relation tangible entre image et son. La narration étant faite de toute pièce, les images étant de ‘vraies’ images (à définir), leurs interactions ouvrent le champ de nouvelles possibilités de réel.

Les différents niveaux d’informations ne coincident pas et amène le spectateur à interroger sa source d’information. Entre les différentes niveaux de transmission (à l’image, au texte défilant sous les images ‘ceci est une fiction’, et surtout à la langue et aux traductions ‘en direct’ des différentes personnes interviewés) le spectateur est confronté à une comédie (le journal est-t-il spectacle?). La scénographie du journal parlé est alors manipulée et exposée avec subtilité pour dévoiler les fils entremêlés du réel et du documentaire.

L’information évolue sans cesse par rapport à son support: passant du journal imprimé, à la télévision et aujourd’hui principalement aux réseaux sociaux. Celle-ci se retrouve de plus en plus comprimé (à des écrans), où l’espace est de plus en plus restreint et pollué: La distinction entre information, publicité, et opinion devient de plus floue: Les narrations se mélangent, mais également la relation au réel comme les rapports à celui-ci.

La question de frontière est intéressante à explorer. D’abord comment la définir: qu’est-ce qu’elle divise, ensuite comment et finalement la nécessité de celle-ci. (Une frontière est un signe?)

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FRONTIÈRE, subst. fém.

A.− Limite qui, naturellement, détermine l'étendue d'un territoire ou qui, par convention, sépare deux États :
Rem. L'examen des syntagmes les plus fréquents fait apparaître un souci de précision
a) géogr. : frontière du Nord, du Sud, septentrionale;
b) hist. : frontière antérieure, postérieure;
c) mais surtout d'ordre milit. et pol. : reconduire à la frontière; violer, défendre, franchir une frontière; tracé, défense de la frontière, incident de frontière; l'autre côté de la frontière; au-delà, par-dessus la frontière.
Frontière d'une région géographique, linguistique.
- Toute espèce de barrage, défense, obstacle que l'on peut ou doit franchir.

B.− Au fig. Limite, point de séparation entre deux choses différentes ou opposées.
Aujourd'hui, et pour tout le temps qui va venir, ma liberté n'a plus de frontières (Camus, Caligula,1944, I, 9, p. 24).

- Chez les romantiques les plus spontanés, un Tieck ou un Brentano, la frontière entre le « dehors » et le « dedans » s'efface si bien que l'on ne sait plus si leurs personnages se cherchent eux-mêmes à travers les spectacles et les aventures, ou si, à travers leurs états d'âme, au hasard des jeux de la pensée et du langage, ils sont en quête de quelque trésor entrevu. Béguin, Âme romant.,1939, p. 397.

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La frontière qui est évoquée ici est avant tout une frontière linguistique, mais les frontières historiques font que différentes langues se retrouvent à cohabiter dans le même territoire (topographie). Qui dit langue, dit naturellement culture, et donc communauté. Au fur et à mesure, la frontière linguistique a progressé jusqu'à une frontière culturelle et économique. C’est ensuite question d’une frontière qui n’existe pas mais qui est ressentie, et se demande si celle-ci doit devenir une frontière administrative (physique?) menant à la définition de nouveaux territoires séparés. La confrontation et un rapport de forces (linguales, socio-économiques, culturelles) questionne l’union qui lie alors la Belgique. Et si c’est un désaccord qui unit le peuple belge? Est-ce que le poids de l’histoire doit entremettre un futur commun?

SONUMA LES ARCHIVES AUDIOVISUELLES Le 13 décembre 2006, la RTBF diffuse un documentaire-fiction sous la forme d'un faux journal télévisé annonçant la déclaration unilatérale d'indépendance de la Flandre. Une majorité des téléspectateurs ne perçoit pas le caractère fictif de l’information et l'émission fait scandale, notamment dans le monde politique.




Bye Bye Belgium, en jouant avec les codes de la transmission d’information, permet d’ajouter une dimension originale au débat qui fait alors tant de bruit: En y amenant une projection utopique, la scission de la Belgique est abordé d’une perspective permettant d'ouvrir le dialogue.

Le programme a engendré de nombreuses réactions, et a mené à d’autres programmes de débat, avec autour de plateau de politiciens wallons et flamands: Par le biais de la fiction, la RTBF a un lieu d’être simple ‘rapporteur d’informations’ (est-ce vraiment possible) a été alors un acteur conséquent dans le débat sur le futur possible de la Belgique.








The term utopia was first written in 1516 by Sir Thomas More. He coined the word 'utopia' from the Greek ou-topos meaning 'no place' or 'nowhere'. But this was a pun - the almost identical Greek word eu-topos means a good place. So at the very heart of the word is a vital question: can a perfect world ever be realised?

16th Century Dreams:
The Land of Utopia


Illustration in Woodcut
Image taken from: Utopia
Created by: Thomas More
Publisher: Arte Theodorici Martini
Date created: 1516


More was an English lawyer, writer, and statesman. He was at one time, one of Henry VIII's most trusted civil servants, becoming Chancellor of England in 1529.Thomas More's book imagines a complex, self-contained community set on an island, in which people share a common culture and way of life.

Wanneer Thomas More in de zomer van 1515 Pieter Gillis in Antwerpen opzoekt, vindt de Engelsman in die ontmoeting de inspiratie voor de aanvang van zijn boek ‘Utopia’. In een merkwaardige mengeling van fictie en realiteit beschrijft More hoe hij Pieter ontmoet vóór de Antwerpse kathedraal, waar de griffier staat te praten met de Portugese zeeman Rafaël Hythlodaeus, de man die het eiland Utopia heeft bezocht en die het hoofdpersonage van het boek zal worden. Pieter, aan wie More zijn beroemde werk uiteindelijk opdraagt, zal zelf de uitgave van de ‘Utopia’ verzorgen in december 1516. Hij vult de fictie van More aan met een persoonlijk bijeen gefantaseerd ‘utopisch’ alfabet. En met die ‘utopische’ letters pleegt hij dan ook een authentiek ‘utopisch’ gedicht, dat Dirk Martens in zijn eerste uitgave opneemt.

In de ‘Utopia’ brengt More een uitgebreide groet aan zijn Antwerpse vriend en hij geeft de volgende beschrijving van diens persoonlijkheid : “Hij is een geboren Antwerpenaar, die onder zijn medeburgers een groot vertrouwen geniet en een eervolle positie inneemt, terwijl hij zeker de meest eervolle verdient. Want of ik deze jongeman eerder om zijn geleerdheid dan om zijn karakter moet prijzen, weet ik niet. Hij is namelijk even rechtschapen als fijn beschaafd, daarbij oprecht van hart tegenover alle mensen, tegenover zijn vrienden echter zo hartelijk, liefhebbend, trouw en hun zo eerlijk toegedaan, dat het moeilijk valt ergens iemand anders te vinden die men zou menen in alle opzichten met hem als vriend te mogen vergelijken. Hij is van een zeldzame bescheidenheid, niemand houdt minder van ijdel vertoon, niemand is zo eenvoudig en verstandig”.


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Phalanstère

Un phalanstère (du grec phalanx, « formation militaire rectangulaire » et stereos, « solide ») est un regroupement organique des éléments considérés nécessaires à la vie harmonieuse d'une communauté appelée la Phalange. Le concept, très en faveur dans les milieux intellectuels au xixe siècle, fut élaboré par Charles Fourier et promu par des industriels idéalistes comme Jean-Baptiste André Godin. C'est un ensemble de logements organisés autour d'une cour couverte centrale, lieu de vie communautaire.